Il est 5h30 du matin, le réveil vient de sonner. Que c’est dur de se lever si tôt un dimanche mais c’est pour la bonne cause. Aujourd’hui c’est pétage de cuisse sur le 90km du Grand Raid Godefroy à Bouillon et ses 2600 mètres de D+. Après avoir réalisé les différents niveaux du bonhomme (vidange et remplissage) je prends la voiture pour rejoindre Philippe qui m’avait proposé ce challenge il y a quelques mois.
Le pick up est déjà prêt pour charger les vélos quand j’arrive sur Sedan et philippe se pose la question du jour, manche courte ou manche longue ? Nous rejoignons bouillon et nous garons facilement sur le parking du supermarché, ce n’est pas la grosse affluence. Philippe n’a pas encore trouvé la réponse à sa question et finalement change de stratégie, départ manche longue avec maillot court dans le sac au cas où.
Nous croisons Jean-Pierre et Clément qui se sont inscris sur le 40km. Nous nous rendons au rassemblement sur l’aire de départ, la musique techno et le speaker essaye de faire monter la pression mais tout le monde sait qu’il ne faudra pas s’enflammer au starter pour tenir la distance. Le départ est donné et nous commençons par un peu de tourisme en faisant l’aller et retour le long de la Semoy puis nous attaquons la première cote dans bouillon. A froid, ça pique les jambes même si on a décidé de démarrer pépère avec philippe. La première montée qui suit est longue mais sans réelle difficulté, je suis au train. Philippe a mal digéré le premier coup de cul et trouve que l’on force trop. Je temporise pour le laissez reprendre son rythme.
Les chemins sont agréables mais nous laissent peu le temps de respirer. Soit ça monte, parfois une pente légère, parfois un beau coup de cul, soit ça descend mais en mode enduro light. Il n’y a aucun temps mort pour récupérer. J’arrive au premier ravito situé devant le tombeau des Géants. Philippe me rejoint rapidement mais ne souhaite pas s’arrêter, nous plongeons donc dans le single après le point de vue. Nous sommes obligés de descendre du VTT pour éviter les 2 ou 3 marches en haut du passage puis montons sur les vélos pour finir avec la banane aux lèvres.
Nous continuons notre chemin ponctué de descente technique et de monté plus ou moins hard. La fatigue commence déjà à marquer les organismes alors qu’il reste 70km de course. On s’attendait à un parcours plus soft pour un marathon.
2eme ravito, j’ai le temps de reprendre des forces avant que Philippe me rejoigne. Il fait aussi l’impasse sur ce ravito ayant pris soin d’emporter 3 litres de boissons avec lui. Je continu ma farnienté et décolle 3 minutes après sont passage. Je mets les watts pour le rattraper et l’aperçois au loin en haut d’une montée. Pensant le rattraper rapidement, je suis surpris de mettre 30 minutes avant de le rejoindre dans une descente technique. Entre temps, j’ai eu le temps de sympathiser avec un picard qui nous félicite pour les jolis chemins de la Région. On continu donc à 3 notre périple quand Philippe m’annonce que c’est un jour sans et qu’il va arrêter les frais pour aujourd’hui. Nous avons fait une quarantaine de kilomètres et ce regain de forme était en fait le chant du cygne.
Nous nous séparons et je continu la route avec mon nouvel ami picard. Dans la montée suivante nous prenons la roue d’un autre Arnaud du club VTT PSA. Nous continuons ensemble le parcours et nous soutenons mutuellement. Petit à petit les kilomètres passent.
3eme ravito et 64 km d’avalé. Notre ami picard ayant plus de pêche nous a lâché dans une montée. Nous continuons Arnaud et moi à nous encourager et à avancer. On se demande depuis quelques kilomètres ce que l’on fait dans cette galère. Ca monte tout le temps, les jambes nous font mal et les crampes arrivent sporadiquement. Encore un long single technique avec de grosses plaques d’ardoises le long de la Semois juste avant le camping de bouillon et je perds Arnaud qui a des problèmes avec sa selle. Je l’attends en haut d’un petit raidillon et au bout de 20 minutes c’est un Philippe dans un état de fatigue avancé qui pointe le bout de son nez. Je repars avec Philippe qui me dit avoir croisé un gars avec un problème de chaîne (Arnaud avait cassé la chape de son dérailleur).
Et zou de nouveau une grande monté (Semoy / Gernelle). Nous nous arrêtons plusieurs fois pour monter à pied et laissez la pression redescendre. Nos corps n’en peuvent plus, n’en veulent plus. Nous essayons de nous motiver plus ou moins adroitement (encore désolé Philippe je te jure que j’étais certain d’être en haut de cette montée interminable). Nous arrivons au dernier ravito ou l’hôtesse nous annonce 5 km et une petite montée. Nous attaquons la descente sur bouillon, un participant dérape sur le bitume humide. Heureusement plus de peur que de mal, du mercurochrome et un bisou magique devrait suffire à le remettre sur pied.
Nous traversons la Semoy au niveau du stade de foot et attaquons la petite montée annoncée par l’hôtesse. Vous avez tous reconnu le lieu et devons donc monter au belvédère surplombant Bouillon en guise de bouquet final. Philippe n’ose à peine y croire, lui qui n’a plus rien dans les guiboles et le moral dans les chaussettes depuis si longtemps jette l’éponge et monte à pied. J’arrive à monter les 2/3 de la cote avant de me résoudre à finir en poussant le vélo comme tant de participants.
J’attends philippe en haut histoire d’arriver ensemble après tant de galères. Dernière petite descente avec virage en épingle permettant de rejoindre Bouillon. Philippe reste joueur et court-circuite une épingle pour me passer devant, je lui rends la monnaie de sa pièce dans le virage suivant. Ce passage nous redonne le sourire avant d’attaquer le dernier single le long de la Semoy. Lors de la dernière petite bosse, sur le dernier coup de pédale de ce marathon je choppe une méchante crampe m’obligeant à rallier l’arrivée sur une jambe. Philippe est accueilli par sa famille (2 générations) ce qui lui redonne du baume au cœur. Nous passons sur le podium d’arrivé pour constater que nous avons mis 8h02 pour faire la totalité du parcours.
Vivement l’année prochaine car Philippe m’a promis de faire le 130km > non je déconne, il nous faudra bien 6 mois pour digérer ce marathon. Vivement celui du Roc pour retrouver ce sentiment de ‘mais qu’est ce que je fou là moi’ et le fameux ‘c’est encore loin cette arrivée de m**de’.