C’est le dernier jour de notre périple dans le Var en ce dimanche et c’est le mythique Roc d’Azur avec ses 56 kilomètres et ses 1800m de D+ qui nous attend. Comme le départ est à 11h15 pour nous, nous nous attardons un peu à table afin de pouvoir rouler sereinement à une heure où nous avons plus l’habitude de nous attabler pour l‘apéro que d’enfourcher nos fidèles destriers. Nous libérons nos chambres et remercions une nouvelle fois nos hôtes de cet accueil sans faille qu’ils nous ont réservés.
Nous sommes sur la base nature à peu plus d’une heure avant le départ ce qui nous laisse le temps de nous préparer tranquillement. Une nouvelle fois je vérifie mes roulements et constate qu’un axe est desserré (c’était l’axe principal hier…). Nous gagnons le sas de départ. Arnaud en profite pour regonfler ses pneus pour la troisième fois en trois jours. Nous faisons quelques photos et le starter nous appel. Nous avons tous un peu mal aux jambes de nos périples précédents et mes compères se plaignent de leur séant alors que le mien plus aguerri ne montre pas de signe de fatigue.
Cette fois c’est parti. Nous ne nous enflammons pas comme hier fixant notre vitesse de croisière à 22km/h. Nous croisons les élites qui en finissent en un peu plus de deux heures. Nos ambitions se limitent à trois fois leur temps. Nous voilà déjà au pied de la première difficulté. Beaucoup de vététistes sont à pieds à notre plus grand étonnement. Pour eux la journée risque d’être très longue. Nous gravissons sans difficulté les 200 premiers mètres de D+ de la journée (3.8 kms). Arnaud s’envole nous ne le reverrons qu’une fois la ligne d’arrivée franchie. C’est le moment où mon dérailleur avant se décide à me lâcher. Pas de soucis 22 dents me suffiront compte tenu du profil. Je lâche les chevaux dans la descente arrivant à slalomer entre les concurrents à pieds. Ce Fournel qui me faisait si peur est devenu pour moi un lieu de plaisir. Stéphane et Philippe restent bloqués. Nous nous retrouvons au ravitaillement. En afficionados de la diététique nous ingurgitons de petits sandwiches saucisson-emmental.
Nous reprenons notre périple pour la deuxième ascension du jour : le sommet de Bourète. Nous y allons à notre rythme. Une fois au sommet nous j’basculons dans la descente, Philippe en tête. Quelques hectomètres plus loin j’aperçois une paire de chaussure Mavic sortir d’un buisson épineux. Philippe vient de tomber au même endroit que vendredi. Après nous être assuré de son intégrité physique nous poursuivons notre folle descente. Nous faisons le point en bas de la descente, à part quelques lambeaux de peau laissés pour nourrir la faune locale tous va bien pour Philippe. Le plus inquiétant est qu’il a entendu un gros craquement lors de sa chute, mais nous ne parvenons pas à savoir d’où cela est venu. Une partie roulante nous permet de nous détendre.
Le rythme est bien rodé : longue montée, descente technique, ravitaillement. Quelques bouchons diminue notre joie qui autrement aurait être comparable à celle du jouvenceau venant de recevoir cinquante euros d’argent de poche et se rendant pour la première fois chez dame Lulu. Après la mythique montée du Bougnon délaissée par les groupies en transe à cette heure avancée, nous descendons vers Les Issambres. Une image me revient en mémoire. J’annonce à mes complices : « On va pleurer ». Après un virage à gauche nous attaquons une côte digne de Rocco Sifredi. Si le début est goudronné, la suite est beaucoup plus technique : cailloux, sable, racines et rochers nous compliquent la tâche. Sans compter qu’il faut slalomer entre les vététistes poussant leur spad et ceux se roulant de douleur au sol perclus de crampes. Malgré cela Stéphane et moi parvenons à nous frayer un chemin sans poser trop souvent le pied à terre.
Le dernier ravitaillement est devant nous. Nous nous attardons le temps de laisser Philippe nous rejoindre. Nous enquillons le dernier secteur difficile se révélant digne des plus belles attractions de Disneyland (avec ses files d’attente). Mais comme a pu le dire Georges Clemenceau le meilleur moment de l’amour c’est quand on monte l’escalier et ces derniers kilomètres en sont composés en montée, mais aussi en descente. Nous dévallons ces marches plus vite mais aussi plus joyeusement que le client qui vient de se délester de 100 euros. Quel plaisir de franchir ces dernières difficultés sur le spad frais comme un gardon alors que la plupart de nos congénères souffrent en poussant leur montures.
Mais toutes les bonnes choses ont une fin. Nous revenons au niveau de la mer après une dernière folle course poursuite entre Stéphane et moi. une dernière descente où nous avons fait gouter à quelques vététistes le nuage de poussière laissé derrière nous. Un dernier tour sur la plage de Saint-Aygulf, le chemin des douaniers et Stéphane nous emmène dans sa roue afin de nous faire franchir tous trois main dans la main une dernière fois cette ligne d’arrivée rêvée depuis de longues années pour certains d’entre nous.
Au moment où je rédige ces lignes, Philippe est au volant, Arnaud et Stéphane somnolent et nous retrouvons la pluie et la grisaille.